Acteur engagé pour l’écosocialisme, tant au niveau local qu’au niveau national, le Parti de Gauche a souhaité se prononcer sur le projet de Center Parc de Poligny, dans la Jura, dans le cadre du débat public organisé jusqu’en septembre 2015. Au vu des éléments que nous avons pu consulter, ce projet nous apparait comme un non-sens, à la fois écologique, financier et économique. L’artificialisation de dizaines d’hectares de forêt nous fait craindre qu’encore une fois notre écosystème soit sacrifié pour le profit d’un groupe privé. Par ailleurs, nous nous insurgeons contre le financement de ce projet privé par des fonds publics, alors même que partout en France, les services publics sont mis à mal par les politiques d’austérité que nous contestons. Ce projet prouve encore une fois que de l’argent il y en a, mais pour les groupes privés et pas pour les citoyen-ne-s ! Enfin, nous contestons l’argument majeur du groupe Pierre et Vacances de créer près de 300 (210 ETP précisément) emplois. Au regard des autres Center Parcs de France, nous savons que ces emplois seront des emplois précaires, sous-payés et soumis à des conditions de travail inacceptables.
Pour tout cela, nous disons que le Center Parcs de Poligny : pour nous, c’est non !
Non à l’artificialisation des sols.
Le premier point de notre opposition au projet de Center Parcs de Poligny concerne l’artificialisation des sols et les dégâts environnementaux d’un tel projet. Bonne communicante, l’entreprise Pierre et Vacances essaye de nous faire passer son projet de Center Parcs à Poligny comme « écologique » et « durable ». Ce projet respecterait la réglementation thermique 2012 pour les bâtiments, la loi sur l’eau, la loi sur les compensations,… Il ne s’aurait en être autrement puisque ces réglementations sont obligatoires et inscrites dans la loi ! Il n’en reste pas moins que le discours « vert » de Pierre et Vacances n’est pas une conviction. Il est un discours mercantile destiné à faire accepter son projet en le faisant passer pour ce qu’il n’est pas. En réalité, il est une aberration écologique.
Déjà, il n’est ni plus ni moins que la destruction (pas vraiment car tout n’est pas détruit, mais la privatisation) de dizaines d’hectares de forêt à des fins d’artificialisation des sols et d’urbanisation d’espace libres, à proximité de deux zones Natura 2000. Rien ne peut compenser de telles pertes. De plus, le site choisit par Pierre et Vacances se situe sur un plateau calcaire, avec sous-sol karstique, ce qui pourrait entrainer une forte pollution des eaux. D’autant plus que pour lemoment, ni les études sur le retraitement des eaux usées, ni les études à propos de l’impact sur le milieu, n’ont été finalisées. Par ailleurs, ce projet gourmand en eau, avec une estimation de 491 m3 d’eau par jour, et en énergie, avec sa bulle équatoriale à 29° toute l’année. Contre une vision mercantile et aseptisée des espaces naturels, nous sommes opposés à ce projet.
Si, pour une fois, il ne s’agit pas d’artificialisation d’une terre agricole, pouvons-nous nous réjouir de l’artificialisation d’une terre sylvicole, qui plus est l’une des plus rentables de la commune ? La privatisation de cette parcelle rendra son exploitation impossible et donc se traduira par une perte économique pour Poligny. Faire parvenir cette parcelle à maturité a représenté un coût pour la collectivité, et au moment même où ce coût doit être enfin rentabilisé, la parcelle est privatisée dans un but commercial. Pour ce seul fait, les polinois, tous propriétaires de la forêt, devraient être consultés pour ce retrait de leur patrimoine collectif. Nous demandons aussi qui gérera la vente, et encaissera l’argent, des arbres à abattre pour la construction du Center Parcs.
NON A UN PROJET D’INTERET PRIVE,FINANCE PAR DES FONDS PUBLICS
En plus d’être un projet anti-écologique, le projet de Center Parcs de Poligny est un projet inutile, financé très largement pas des fonds publics. Pierre et Vacances est une entreprise qui tire des bénéfices des investissements des collectivités locales et de l’état. Le projet prévoit la création d’une Société d’Économie Mixte, avec un investissement public de 36.5 millions d’euros minimum. A cela, il faut ajouter la réalisationdes infrastructures nécessaires à l’accueil de cette ville de 2000 habitant-e-s en plein milieu d’une zone forestière. Cet investissement a été estimé par les élue- s locaux à 14 millions d’euros de voirie et réseaux divers. Enfin, Pierre et Vacances est un groupe passé maitre dans l’opportunisme et l’utilisation de toutes les subventions publiques possibles. Aux fonds publics mobilisés pour financer les villages dont elle tirera des bénéfices, il faut en effet ajouter l’optimisation fiscale mise en place par l’entreprise pour ne pas payer d’impôts : 12 millions de crédits d’impôts pour l’achat des cottages avant décembre 2016 (sauf si la loi venait à être prolongée, ce qui a déjà était le cas une fois), en faisant jouer la loi Censis-Bouvard qui permet d’obtenir pour un investissement locatif, 11% de réduction d’impôt sur le coût de cet investissement. Au final, le projet devrait couter au minimum 70 millions d’euros à la collectivité !
Nous refusons que l’argent public serve les intérêts d’un groupe privé. À l’heure de la casse des services publics sur l’autel des politiques autoritaires, nous appelons à ce que ces fonds publics servent à la mise en place d’une véritable politique publique dans la région, beaucoup plus productrice d’emplois durables que ce projet absurde. En ce sens, le parti de gauche appelle la population et les élu-e-s à soutenir la démarche d’un projet alternatif porté par l’association ID Jura. Il apparaît difficile de réaliser à la fois le projet de CP très dispendieux et le projet alternatif. Nous refusons de croire qu’ils sont des projets complémentaires, et nous affirmons le caractère antagonique et alternatif de ces deux projets.
Dans un esprit de solidarité avec les générations futures, le parti de gauche entend aussi relativiser les avantages promis en appréciant les conséquences sur le long terme. Nous entendons les perspectives de retombées économiques et nous comprenons le montage permettant à la SEM de percevoir des loyers, et donc de « rentrer dans ses frais » de la part de Pierre et Vacance. Cependant, nous doutons fortement de la rentabilité à long terme de cet investissement du fait du transfert de la propriété et donc du risque sur la SEM. Si Pierre et Vacances refuse de prendre le risque à sa charge alors que ce risque était pris dans les center parcs anciens, c’est qu’il y a anguille sous roche. Que fera la collectivité publique dans 50 ans avec ces infrastructures et avec une propriété morcelée entre investisseurs et SEM ? De même, nous pensons que la somme des travaux d’entretien qui devront être réalisés sur la bulle, et qui reviendront à la SEM, ne pourra qu’alourdir la charge que représentera dans 50 ans cette infrastructure pour les collectivités.
Halte au chantage à l’emploi !
Pour imposer son projet, Pierre et Vacances annonce à qui veut le croire la création de 210 ETP emplois avec le projet de Center Parcs de Poligny. Ce qui n’est pas précisé, c’est que 38% des postes seront des postes à temps partiel, de 9 heures par semaine, payés au salaire minimum bien sûr ! On retrouve ces minicontrats dans tous les Center Parcs de France, car ils permettent au groupe de s’adapter plus facilement aux flux de visiteurs. Bonjour la précarité, pour ces centaines de personnes qui se retrouveront à travailler pour 300 euros par mois, alors même que l’amplitude des emplois proposés, et la localisation en pleine nature du parc, ne leur permettront pas de les compléter avec un autre travail. Ces emplois à temps partiel payés au SMIC ne trompent pas. Dans un article de mai 2015, la Nouvelle République indiquait qu’à moins de cinq semaines de son ouverture, le Center Parcs du Nord Vienne avait du mal à terminer son recrutement.
Par ailleurs, aucune garantie n’est donnée quant aux conditions de travail dans le parc. Un peu partout en France, les syndicats se sont plaints des méthodes employées par la direction : salaires trop bas, souseffectifs, formations inadaptées, mini-contrats de dix heures, manque de matériel, employé-e-s en dépression,… Pierre et Vacances, c’est donc des emplois précarisés payés par les contribuables pour le seul bénéfice d’un groupe privé.
Encart : les grèves dans les Centers Parcs
En 2011, à peine un an après la création du Center Parcs de Hattigny (Moselle), une cinquantaine de
salarié-e-s s’est mise en grève à l’appel de la CFDT, pour dénoncer les conditions de travail et le nonrespect de certains droits de leurs conventions collectives.
Les salariés témoignent dans l’édition du Républicain Lorrain du 15 novembre 2011 : « On est des esclaves, souffle une manifestante. On travaille trois week-ends par mois et on n’a aucune reconnaissance. » « On commence à la piscine à 5 h jusqu’à 9 h 30. De 10 h à 15 h, on est dans les cottages. Certains sont propres, d’autres très sales. Les temps qui nous sont donnés pour nettoyer les chalets sont trop courts. Pour que les clients aient leur logement à 15 h, nous sommes obligées, la plupart du temps, de ne pas prendre notre pause de 12 h à 12 h 30. » « Je touche 270 € par mois pour deux jours de travail par semaine. Si on rajoute la mutuelle « obligatoire » de 30 €, il ne reste plus grand-chose à la fin du mois. »
En 2012, ce fut au tour des salariés du Center Parcs de Laon de se mettre en grève. Les griefs sont toujours les mêmes : salaires trop bas, surcharge de travail, manque de moyens humains et matériels.
En 2014, à peine un an après l’ouverture du Center Parcs de Chamouille, une cinquantaine de salarié-e-s fit grève à l’appel de la CGT et de la CFDT pour dénoncer les conditions de travail
LES ELU-E-S LOCAUX SONT RESPONSABLES !
Attaché aux valeurs démocratiques et à la consultation populaire, le parti de gauche ne peut que regretter la manière dont certain-e-s élu-e-s ont agi dans ce dossier. Pourquoi les négociations ont-elles été tenues secrètes alors qu’elles ont débuté en 2008 ?
De même, nous critiquons vivement la manière très maladroite de certain-e-s élu-e-s polinois-es et
jurassiens-ennes d’avoir annoncé solennellement au printemps 2014 que « c’[était)officiel, le center parcs allait se faire » ou encore que « Pierre [avait] choisi Poligny ! » avant de se rétracter en décembre 2014 pour annoncer la saisine de la CNDt pour la tenue d’un débat public, avant lequel aucune décision ne serait prise. Dans ce contexte et malgré la probité et le professionnalisme de la commission particulière et particulièrement de sa présidente, de nombreux citoyens ont été découragés et se sont donc détournés du sujet.
Encore, nous souhaitons publiquement contester l’attitude de certain-e-s élu-e-s locaux dans le dossier.Il est regrettable de constater leur désinvolture dans le débat. Lorsqu’ils/elles étaient présent-e-s aux réunions, leur attitude amusée et leur politesse de façade avait du mal à cacher leur indifférence à l’égard des idées opposées, notamment des projets alternatifs. Devant la somme des fonds publics investis, pourquoi ces élu-e-s n’ont-ils/elles pas lancé d’appels à projets pour des idées de développement alternatif du territoire, et pourquoi refusent-ils de soutenir l’association ID Jura porteuse d’un tel projet ?
SYNTHESE :
En définitive, nous sommes opposés au projet de Center Parcs de Poligny car il va à l’encontre du bon sens, à la fois écologique et économique. Alors que le monde peine à prendre enfin conscience que le mode de vie occidental n’est pas viable à l’échelle de la planète, comment défendre un tel projet anti-écologique ? Le Center Parcs de Poligny, c’est le sacrifice d’un écosystème local important, ainsi qu’un gaspillage