Ne nous y trompons pas : les mêmes causes conduisent aux mêmes effets. Que ce soit le 49-3 manié comme une trique par Manuel Valls pour faire passer une 2ème fois la Loi Macron ou l’intransigeance de la Troïka face au gouvernement grec, c’est la même logique austéritaire qui est à l’œuvre. Faute de l’adhésion des peuples, on contourne leur souveraineté : celle des grecs qui ont donné mandat à leur gouvernement d’en finir avec le Mémorandum, celle d’une Assemblée nationale dont une majorité de député-e-s ne veut pas d’une loi. S’il fallait des preuves supplémentaires que la tendance profonde du 3ème âge du capitalisme est a-démocratique, ce mois de juin en est rempli.
La souveraineté de la finance utilisant à plein un marché mondialisé et libre-échangiste a le caractère absolutiste de l’ancien régime. Les mécanismes institutionnels qu’elle invente ou utilise à cet effet se révèlent parfaitement adaptés : l’Union Européenne des actuels traités ou la monarchie élective qu’est la 5ème République. C’est pourquoi nous nous opposons à l’une et à l’autre. C’est pourquoi il ne peut y avoir d’alternative au capitalisme financiarisé qu’en mettant un terme à l’une et à l’autre.
C’est également par des moyens coercitifs et sécuritaires que l’actuel système traite ses récalcitrants et ses laissés pour compte de plus en plus nombreux : sous prétexte de flexibilité, on enlève une à une les protections légales des salariés conquises par des décennies de lutte, on culpabilise des chômeurs toujours plus nombreux, on remplace ou affaiblit des mécanismes de solidarité, on réprime les réfugiés et leurs soutiens en espérant les faire disparaître dans une marginalité périphérique, donc invisible, ou en les cantonnant chez le voisin.
Combien de temps tout cela tiendra-t-il ? Car les feux n’en finissent pas de s’emballer sous la cocotte-minute. Tout système bloqué produisant une politique aussi injuste qu’inefficace ne tient pas indéfiniment. Toute la question est de savoir si nous sommes plutôt en 1788 ou en 1932… Si la contagion viendra du sud, des révolutions citoyennes qui émergent à Athènes, Barcelone ou Madrid ou bien de l’ordre nouveau qui gagne du terrain dans plusieurs pays de l’Europe de l’Est ou du Nord sans compter la France.
Une chose est sûre : la poigne austéritaire renforce idéologiquement l’extrême-droite. Dans cette course de vitesse, il faut utiliser toute occasion pour arracher cette camisole. Et ce sur les deux terrains dont le libéralisme tente de dissimuler la réalité sous les émollients de la médiacratie : la confrontation de classe et l’étouffement de la citoyenneté. Le bras de fer entre la Troïka et le gouvernement grec incarne parfaitement les deux. C’est pourquoi il est de notre devoir d’être le plus nombreux possible dans la rue le 20 juin en solidarité avec la Grèce. Pour eux comme pour nous.
Eric Coquerel
Coordinateur politique du Parti de Gauche